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4.
Septembre

Ne pas laisser  sa mémoire ternir un peu trop la lente beauté sourde du soir. Sentir enfin filer en corps l’humide été du jour. Glisser des yeux vers la ligne assoupie du voyage et attendre. La transparence grisée de tes rêves entretient comme un mystère. Ton regard n’est pas inquiet. Tu as cette élégance  racée des grands félins. Attentifs aux limbes toujours nouveaux du crépuscule. Je devine les mouvements infimes de tes paupières que dérange sans cesse l’âpreté du nuage. Il s’effiloche vite et se perd dans la tombée rampante de la nuit.

Ce n’est pas toi Judith, ou c’est peut-être toi. On ne rencontre jamais son attente. Les trains ont changé. Le temps a changé. La valeur du temps a changé.
La vieille odeur du gas-oil chaud ne fait plus frémir la nostalgie. Les larmes sont sèches. Je perçois le sifflement qui se grave. Juste un trait de lumière vibrante, fugitif, étincelant tel un signe de fête.
        “Car, c’est dans les maisons chaudes et vastes que les fêtes s’organisent et se donnent.”

J’aime à te regarder. J’aime à laisser filer en moi ces minutes précieuses de ta connaissance. Je suis comme un peintre. Le désir effleure la toile, vierge et tendue, la caresse infiniment avec lenteur, appuyant juste un peu la ligne de crête. La douce lenteur du savoir. Le tendre chant des mots à venir. Ils sont déjà en contrepoint, de ta mélodie simple évidente. Les mots qui se croisent et se frôlent, s’attardent et glissent en mémoire, et puis t’écrivent  là-haut, dans le ciel où tes yeux infiniment nus se frottent aux nuages du soir.
J’aime à te regarder. Laisser mon regard s’évanouir aux confins de tes reins et se donner à l’onde.
Plus tard la nuit sera urbaine. Les vagues incertaines.
Oui. Sans doute enfin toi.
Ne plus attendre et savoir. Ta rencontre tout autant improbable.

Je te lis comme la page enviée de mes  errances  tranquilles. Tes lignes où mes mots m’allongent, comme un chat en volupté.
Tu viens, légère et si peu prenante, comme l’instant qui se pose, en éternité. Ainsi es tu. Et  telle en est ta si précieuse présence. Il est de ces heures quand l’asphalte te dresse au front de la nuit d’été, de ces heures immanquables, de ces heures entre l’être et le mort, une heure depuis irrémédiable.
J’aime tant ces volutes échappées de tes silences.
Tu as si simplement l’essence des voluptés secrètes. Tu dis les mots, les mots pareil. Les mots toujours. Tu sais.
Oui, tu sais. Les touches en noir et blanc m’entretiennent de toi.
Comme en confession.

Quelquefois la nuit est si noire. Plus noire que l’asphalte du soir. Tout soleil est mort. Et voici que déjà se dresse le gibet. Et l’ombre se traîne laborieuse à son trépas.
Tout espérance est vaine et vaincue.
Les yeux cherchant.
Et, comme un trait à peine posé, du peintre ou de la  musique, venue de ce lointain présent, j’entrevois ta ligne insoupçonnée. La langueur fière et haute de tes seins.
Qui tendent au ciel quelque psaume profane. Prière d’asphalte. L’ombre portée de tes si lointains désirs. Qui s’accrochent à mon attente, enfin. Tu es si là.
Je t’aime déjà, comme ma si proche évidence. Je t’aime ainsi que la révélation faite au voyageur. Je t’aime autant que mon coeur peut porter, d’amour.
Autant que mon jour veut de vie.

Je te rencontre, fin de jour de ces rêves qui font la réponse.

 

Tag(s) : #Rencontres
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