Ce septième jour de novembre est entré dans la nuit, déjà d'hiver, même si la température n'en est pas. Toi, Berthe, tu ne
connais pas ces préoccupations, car dans ta vitrine sécurisée tu es maintenant à température et autres valeurs hygrométriques, constantes. Il en va de ta conservation, c'est à dire en fin de
compte, de l'avenir du Monde. Ce qui n'est pas rien, tu en conviendras. La lumière, aussi, t'es comptée, même mesurée, filtrée, feutrée, adoucie... Toi, fille des sables, fille des déserts sans
autres limites que l'épuisement, toi Law te voilà maintenant soigneusement abritée de tout, protégée à l'extrème des possibilités de la technologie moderne. Il est vrai que l'archéologue avait
posé ses conditions à ta venue en ces lieux, strict et bien long cahier des charges, qu'il avait très officiellement remis au Conservateur.
Mais toi, Berthe, tu sais bien au fond qu'un de ces jours prochains, à moins que ce ne soit une nuit, et bien tu vas partir d'ici. Alors, plus de protection, plus de constantes hygrométriques, plus de flux lumineux tamisé. Plus rien de tout ça. La liberté... en ces temps d'errance bien nombreux s'en font valeur, au mieux. Mais la liberté, Berthe, la liberté ne justifie pas l'abandon, la liberté ne justifie pas le rejet de ton passé, pas plus qu'elle ne justifie l'assurance de ton avenir. La liberté est une valeur des hommes qu'il n'est aucunement question ici de rapporter et encore moins d'en débattre, comme disent les hommes de la parole. "La liberté de l' individu doit être ainsi bornée : il ne doit pas se rendre nuisible aux autres.". John Stuart Mill [1806 - 1873]
Mais il est vrai, Berthe, il est vrai qu'un jour prochain tu quitteras ces lieux de mémoire. Il est ainsi écrit.
Souviens-toi du livre: "Je suis à toi, saches le bien et je vais te donner les premiers enfants de cette humanité absoute désormais du péché..."
Mais attention, Berthe, attention à ne pas trahir l'engagement des tablettes. Je sens parfois en toi la tentation, la tentation folle et malfaisante, la pomme ou le serpent, qu'importe au fond les métaphores, seule compte la pensée qui les a tracées. Si la pensée est en déroute, en faute ou en errance, les métaphores, ces images des mots, que le peintre ignore, et bien les métaphores ne seront pas du langage de Dieu, puisque c'est ainsi que les hommes ont nommé la poésie. Alors, il n'y aura que pâles figures de style, plus ou moins inspirées, souvent moins. Alors il n'y aura que lâcheté de ne pas dire la vérité, et toi Berthe, toi, tu ne peux pas mentir. Non, tu ne le peux pas. Car la vérité, ta vérité, elle t'a menée Ici, en ces lieux, et c'est elle qui te conduira là où tu vas te rendre, très bientôt, Berthe, très bientôt, quand les feuilles trop ocres, trop rougeoyantes aussi, trop légères et trop futiles, quand les feuilles en auront fini avec l'automne. Alors Berthe, alors, tu sortiras de ta vitrine...
et ce sera, naturellement, au grand désespoir du Conservateur, qui déjà ne se remet pas de la perte du Chat...
Aller, Berthe, aller... ce fut un jour septième en demi-teinte, d'automne. La sente a conduit ma route à travers bois, où les troncs et les branches défeuillés semblent déjà les mannequins nus de l'hiver. Mais ce ciel était beau. Ah, Berthe, ces chemins, ces chemins tant prisés de ton archéologue. Et puis la ville des hommes, légère et à ton image, de patrimoine. Bien des silhouettes, dont certaines, nul doute, erraient. Et puis quelques lieux dans la nuit qui s'avance... le lieu que l'ange visita, un de ces temps récents, un lieu que des hommes lointains avaient sans doute édifié pour Toi. Oui, pour Toi. Mais les hommes n'ont pas la constance, ils ont abandonné le lieu. Et maintenant, laissé à sa décrépitude, il s'ouvre parfois à des rêveurs innocents, hommes de couleurs, hommes de mots. Ouvert à tous les vents le lieu perçoit aussi, parfois, de maléfiques serveurs. Il en est ainsi de toute humanité, et c'est à l'homme de choisir où est sa vérité: dans la joie et le don, ou dans l'errance et la mort. Tu sais bien, Berthe, tu sais bien qu'il en est ainsi depuis ton Temps.
Alors, il n'est que toi qui a le message, oui le Message, de changer d'aire.
Mais toi, Berthe, tu sais bien au fond qu'un de ces jours prochains, à moins que ce ne soit une nuit, et bien tu vas partir d'ici. Alors, plus de protection, plus de constantes hygrométriques, plus de flux lumineux tamisé. Plus rien de tout ça. La liberté... en ces temps d'errance bien nombreux s'en font valeur, au mieux. Mais la liberté, Berthe, la liberté ne justifie pas l'abandon, la liberté ne justifie pas le rejet de ton passé, pas plus qu'elle ne justifie l'assurance de ton avenir. La liberté est une valeur des hommes qu'il n'est aucunement question ici de rapporter et encore moins d'en débattre, comme disent les hommes de la parole. "La liberté de l' individu doit être ainsi bornée : il ne doit pas se rendre nuisible aux autres.". John Stuart Mill [1806 - 1873]
Mais il est vrai, Berthe, il est vrai qu'un jour prochain tu quitteras ces lieux de mémoire. Il est ainsi écrit.
Souviens-toi du livre: "Je suis à toi, saches le bien et je vais te donner les premiers enfants de cette humanité absoute désormais du péché..."
Mais attention, Berthe, attention à ne pas trahir l'engagement des tablettes. Je sens parfois en toi la tentation, la tentation folle et malfaisante, la pomme ou le serpent, qu'importe au fond les métaphores, seule compte la pensée qui les a tracées. Si la pensée est en déroute, en faute ou en errance, les métaphores, ces images des mots, que le peintre ignore, et bien les métaphores ne seront pas du langage de Dieu, puisque c'est ainsi que les hommes ont nommé la poésie. Alors, il n'y aura que pâles figures de style, plus ou moins inspirées, souvent moins. Alors il n'y aura que lâcheté de ne pas dire la vérité, et toi Berthe, toi, tu ne peux pas mentir. Non, tu ne le peux pas. Car la vérité, ta vérité, elle t'a menée Ici, en ces lieux, et c'est elle qui te conduira là où tu vas te rendre, très bientôt, Berthe, très bientôt, quand les feuilles trop ocres, trop rougeoyantes aussi, trop légères et trop futiles, quand les feuilles en auront fini avec l'automne. Alors Berthe, alors, tu sortiras de ta vitrine...
et ce sera, naturellement, au grand désespoir du Conservateur, qui déjà ne se remet pas de la perte du Chat...
Aller, Berthe, aller... ce fut un jour septième en demi-teinte, d'automne. La sente a conduit ma route à travers bois, où les troncs et les branches défeuillés semblent déjà les mannequins nus de l'hiver. Mais ce ciel était beau. Ah, Berthe, ces chemins, ces chemins tant prisés de ton archéologue. Et puis la ville des hommes, légère et à ton image, de patrimoine. Bien des silhouettes, dont certaines, nul doute, erraient. Et puis quelques lieux dans la nuit qui s'avance... le lieu que l'ange visita, un de ces temps récents, un lieu que des hommes lointains avaient sans doute édifié pour Toi. Oui, pour Toi. Mais les hommes n'ont pas la constance, ils ont abandonné le lieu. Et maintenant, laissé à sa décrépitude, il s'ouvre parfois à des rêveurs innocents, hommes de couleurs, hommes de mots. Ouvert à tous les vents le lieu perçoit aussi, parfois, de maléfiques serveurs. Il en est ainsi de toute humanité, et c'est à l'homme de choisir où est sa vérité: dans la joie et le don, ou dans l'errance et la mort. Tu sais bien, Berthe, tu sais bien qu'il en est ainsi depuis ton Temps.
Alors, il n'est que toi qui a le message, oui le Message, de changer d'aire.